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Les Connexions au Vivant

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Peut-on contrôler l'incontrôlable ? Le confort nous préserve autant qu'il nous anesthésie. A tel point que sa nature, éphémère et précaire, s'est entièrement évaporée de nos champs imaginables. La réintégrer, reviendrait à accepter une part que nos civilisations ont refoulées: notre fragilité.

Loin des omniprésents clichés vendus comme modèles, allant d'indécentes propriétés instagramables, d'inégalables états de santé frôlant l'immortalité, d'une délirante jouissance permise par des dégueulées d'opulence sans borne, jusqu'aux récentes acquisitions de gigantesques bunkers perchés en Nouvelle-Zélande, parallèlement, une humanité lutte avec la réalité. Nous, étrangers de ces cocons artificiels, dansons sur une sinistre ligne de crête où les moyens de survie restent conditionnés. Tout peut nous être arraché. La maladie, le deuil, la guerre, un accident, ou une catastrophe peuvent abruptement nous plonger en l'enfer de la pauvreté la plus absolue. Ces lambeaux de vie qui s'effacent pour ne laisser place qu'à une existence condamnée, une survie dans sa forme la plus violente, sans toit ni ressource, rongée par les affres d'un combat quotidien pour ne pas mourir de froid, de faim, ou foudroyée par une quelconque bactérie ou pathologie. Des milliers d'années n'ont pas suffit à la prétendue conscience supérieure qu'invoque notre espèce pour enfanter une société harmonieuse, où l'intégrité de chacune de ses cellules, chaque individu, y serait inconditionnellement préservées et pansées, où le vivant dans toutes ses formes devrait constitutionnellement être protégé. Voilà les toutes premières briques d'une réelle humanité.

Comme vous le savez j'ai oeuvré, durant plus quinze ans, dans le domaine du prompt secours, en qualité de formateur et de secouriste. Oscillant entre des statuts de bénévole et de salariat, j'ai formé des milliers de personnes aux premiers secours, dans les entreprises, les écoles, aux JAPD, et en interne, armant d'un savoir avancé de prompt secours ceux qui allaient rejoindre notre flotte d'équipiers secouristes. Des compétences et une pédagogie qui me firent confiées par des instructeurs passionnés, des infirmiers anesthésistes, des médecins, des ambulanciers, tous attachés au SMUR de mon département, et que je n'ai tenté que de transmettre.
Autour de ce fil rouge, mon parcours professionnel dans la discipline de la biologie, initié par une formation en laboratoire médical, m'emmena à arpenter les plus importants laboratoires biomédicales et services de soins de ma région: Hématologie/Hémostase, Biochimie, neurovasculaire, réanimation, etc.

Par ces activités d'équipier secouriste et par mes missions à l'hôpital, je fus témoin de l'implacable fatalité, j'ai assisté à des tragédies humaines, j'ai entendu des sanglots de détresse qui auraient pu briser les cieux, et, de mes yeux, j'ai vu le choc saisir et ravager.

L'expertise incontestée de la structure de secours que j'avais intégré, dans la réponse d'urgence aux catastrophes à l'international, m'ouvrit des expériences et des compétences qui, au fur et à mesure de mes implications aux exercices préfectoraux, aux différents plans déclenchés, aux CAI et CHU déployés, et aux formations des acteurs de l'urgence dispensées, dressèrent une globalité, une modeste pensée.

Intégrer le Cygne Noir

Frappé par un drame d'une quelconque nature, individuelle ou collective, nous ressentons son souffle nous happer, plonger en une glaçante terreur et une profonde sidération. Comme sonné par un uppercut. Cet état temporaire de KO est le seul moyen à notre psyché pour, du choc, nous préserver. Le temps laissant, peu à peu, l'inconscient absorber l'aporie, nous reprenons progressivement nos esprits.

Cet impact en nos armatures psychiques est inévitable. Voir, sous ses pieds, son monde se fissurer puis s'évaporer demeure un tsunami émotionnel singulier pour une existence humaine. De ce point critique, certains auront la chance de se relever, alors que d'autres, à jamais perdus, sombreront.

Photo: Denis SALEM, https://denissalem.ovh

Comme évoqué plus haut, ma conviction, jugée d'utopie, reste que de tels dispositifs garantissant à tous la survie et une dignité suffisante, sans condition ni stigmatisation, devraient se trouver au coeur des fondements d'une civilisation mondiale supposément humaine. Or, nous en sommes loin. Et, c'est précisément ce vide laissé qui appel, par nécessité, quiconque à échafauder ses réponses individuelles. La première étape d'une telle entreprise consisterait à un simple exercice de pensée. Après avoir listé toutes les éventuelles tragédies (maladie, accident, catastrophe, ...) qui pourraient frapper, les avoir classé par ordre de probabilité, nous devons, en chacune d'elle, nous projeter et nous questionner: Qu'est-ce qui, quand le sang, les larmes, la douleur ou la violence devient omniprésents, pourrait m'aider et optimiserait ma résilience ?

De cette plongée en ces abysses acides naîtront nos différentes stratégies préventives et curatives. Bien que, effectuée avec l'exigence requise, cette quête introspective renferme une dérangeante sensation. Celle des intimes reflets que ce froid miroir psychique nous renvoi. Notre rapport à la mort, la maladie, à la fragilité, et à tous les spectres noirs innés à nos incarnations que nous refoulons sous le tapis de notre quotidien.

Rethinking Preparedness

Imaginez-vous dans votre petite maison isolée, enchâssée par les arbres d'une foret insondable et pleine de vie, où, en cette belle journée estivale, règne tranquillité et harmonie. Alors que votre playlist préférée diffuse ses bonnes ondes en fond, vous vous attelez à la confection d'un bon gâteau dans votre cuisine. Jusqu'au moment où les tocs à la porte vous arrachent de votre activité. Devant vous se dressent deux pompiers. Ils vous informent qu'un feu sans précédent s'approche à une vitesse folle, et que vous n'avez plus que dix minutes maximum pour quitter votre domicile avant que celui-ci périsse dans l'infernal mur de flammes.

Il vous faudra du temps pour retrouver vos esprits, absorber la situation, sa brutalité, et vous préserver de la panique. De là, plusieurs questions s'imposent: Dans une telle configuration, que prendre ? Est-ce que dix minutes suffiront pour tout rassembler ? Comment vivre l'après, faire le deuil de tout ce qui a été laissé, ce cocon, ce petit univers et tous les souvenirs qui lui sont attachés ?

Voilà l'une des mise en abyme que j'inoculais à mon auditoire, lors de mes formations à la réduction des risques, pour faire naître le trouble, l'échange et la réflexion.

Instinctivement, l'évocation d'une évacuation comprend l'idée d'un sac d'évacuation. Ces paquetages, clef de voûte du monde survivaliste, qui inondaient Youtube durant les années 2010, doivent être dépassés. Disons-le clairement, la quasi-totalité des évacuations auxquelles nous pourrions être exposés s'effectueraient vers des points de chutes personnels (amis, hotels, etc) et des CHU ou CAI. Alors, pourquoi voir dans un tel sac des badés de scies, bâches, butagaz, et autres poids morts initialement réservés au camping ? Rappelons que, selon la situation, les CAI ou CHU mis à disposition proposerons boissons chaudes, lits "picot", sanitaires ainsi qu'un soutien médical et psychologique.

Au quatre coin du globe des gouvernements invitent leur population à s'insérer en une telle démarche. Pour notre hexagone, le Plan Familial d'autoprotection (récemment mis à jour) incarne cette invitation à la préparation. Or, cet outil de travail demeure une base et non une finalité. Ses éléments pourront se fondre à notre démarche, en les adaptant, en les courbant, en les revisitant totalement, en brisant leur limites.

Ici, vous l'aurez compris, l'unique moteur de ces lignes n'est pas de vous suggérer du "clef en main", comme un énième gadget poussiéreux peuplant notre habitat, mais bien de saisir ces concepts et les intégrer comme parties d'une application beaucoup plus vaste, jusqu'à notre quotidien. A l'époque, nous nous appuyions sur le CataKit (sac à visée pédagogique, non commercialisé) pour provoquer les débats et évoquer ses upgrades possibles par nos apprenants. Outil permettant une premiére approche des besoins élémentaires de se nourrir, boire, se soigner, se proteger, et de constater qu'ils s'articulent différemment selon que vous soyez célibataire ou une famille, selon votre localisation géographique (et ses risques), urbaine ou campagne, selon vos moyens de transports et vos différentes contraintes (maladies, etc.).

Ce travail de fond est une opportunité à repenser ses fonctionnements en profondeur (en y joignant un solide ménage de printemps). Une refonte autant matériel qu'immatériel. Armé d'un mindset remodelé qui permettrait de, quelque soit la menace, naturellement, tout absorber. Il y a quelques années Geoffrey Dorne confessait, alors que les box fibrées s'imposaient comme standard dans tous les foyers, n'avoir que comme seul accès à internet le partage de connexion de son smartphone. Dès lors, comme moi surement, auriez-vous hâtivement condamné ce choix à ses limites sans percevoir ce qu'il renferme: un exercice stimulant de sobriété numérique, une flexibilité, une légèreté et, surtout, une grande mobilité. Cette capacité de nomadisme permettant, en cas d'exode forcée, de garder inchangé ses habitudes de connexion.

Par cet exemple, appuyer ma conviction: Dans l'arrachement, les morceaux de notre monde doivent nous suivre. Ce sont les éléments qui font notre quotidien (vêtements, informatiques, nourriture, etc.) qui doivent peupler nos solutions d'évacuations, pour des considérations psychologiques évidentes.

Photo: Denis SALEM, https://denissalem.ovh

Enfin, notre réflexion doit couvrir tous les angles. Jusqu'à l'éthique. Nous savons ce que la pourriture humaine peut enfanter. Combien d'animaux domestiques, chaque année, sont abandonnés, laissés au plus funeste sort, par ceux qui, pourtant, avaient juré de toujours les protéger, mais se précipiteront, sournoisement, quelque temps plus tard, de trahir toute forme de valeur humaine pour la "tranquillité" d'un départ en vacance, un projet impensé de reconfiguration du foyer familial, ou par une simple et capricieuse lassitude consumériste. Et ça, en temps normal. Imaginez en période de crise, cette folie démultipliée. Quelques soient les circonstances, ces immondes lâchetés doivent à jamais marquer leurs auteurs au fer rouge. Nous, humain, avons déjà intégré nos compagnons non-humain, comme membre à part entière de notre famille, aux préparatifs de résilience, en prévoyant carnets de santé, certificats I-CAD, caisses de transports, nourriture, à toutes éventuelles évacuations.

Nos plans permettront, évidement, de proposer de l'aide (mutualisée) à notre voisinage frappé d'une mobilité limitée en cas de fuite nécessaire. Notre vision demeure celle de la solidarité et coopération.

Maillage résistant

Ici, une clarification s'impose. Ces lignes ne seraient, en aucune façon, une ode au mouvement survivaliste. Répétons-le: si un brasier nucléaire ou une quelconque comète finissaient par raser notre humanité, je préférerais mille fois périr avec cette dernière, plutôt que de survivre avec ses rescapés. Car je sais trop bien quel type de société, d'eux, naîtra. Un champ de ruines perpétuel fondé sur la peur, la domination, l'hostilité, la violence et un individualisme poussé à son climax. Dès lors, j'entend certains me crier que la démarche survivaliste inclut l'entraide. Oui, mais une entraide si conditionnelle, si intéressée, si viciée qu'elle devient pure simulacre, qui laisse dans chaque écart, dans chaque présupposée menace, le pretexte à accoucher d'effroyables bains de sang. Aucune structure horizontale et globale, aucune volonté de démocratie directe, aucun réel commun, harmonie et empathie ne peuvent prendre pied en ces forteresses isolées (BAD). Pourtant, malgré ses idéos rances et ses excès, ce mouvement apporta des concepts majeurs (sac d'evacuation, EDC, etc.) et les premiers jalons d'une prise de conscience.

Avant de voir notre quartier, nos villes, notre pays ou notre Terre emportés par un incident naturel ou technologique, nous ressentons une crise traverser nos existences. Celle d'un systeme qui entre en son crépuscule. Une mort programmée que nous sentons, jour après jour, fatalement, se rapprocher. Par le délitement quasi-exponentiel de nos services publiques, de nos réseaux de santé, nos dispositifs sociaux, nos transports, l'energie, tout devient impensé, impensable et glaçant d'absurdité. Ce commun que nos aînés avaient étayé après la guerre, qui permettait à chacun d'être soigné gratuitement, de se voir préservé de la pauvreté, ou de pouvoir se déplacer, se chauffer à des couts acceptables, ce commun qui aurait pu ouvrir la voie du bien-être à d'autres pays fut la cible privilégiée de la horde de fossoyeurs qui n'a eu de cesse de saturer les lieux de pouvoirs de notre hexagone depuis plusieurs décennies. Piller, piétiner, saigner ce que la sueur du collectif a bâti, jusqu'à l'hemorragie, jusqu'à l'asystole. Et se gaver, jusqu'à l'aveuglement, jusqu'à l'hubris, jusqu'à devenir, dans les rires et le cynisme, les contre-maîtres de la destruction, de la mort.

Un jour, l'État fut nu. Ces jours où la pandemie du SRAS-CoV2 fut un révélateur, une mise en lumière de leur crasse incurie. Les essentiels étaient absents. Des masques attendus de Chine. Les masques improvisés avec des lambeaux de tissus. Alors que la peur guidait notre belle population à dévaliser les rayons de pates et de PQ, le corps soignant était équipé de simples sacs poubelles comme unique protection contre un virus omnipresent.

L'effondrement rampant. Aujourd'hui, c'est un nombre croissant de personnes qui se retrouvent sans medecin generaliste, sans possibilité d'être accepté sur la liste des patients de dentistes, d'ophtalmologistes et autres specialistes, interdit d'IRM ou de scanner. Savez-vous ce que cela fait de se voir abandonné par le seul édifice qui est censé, sans condition, soigner un mal qui viendrait nous foudroyer, de se voir démuni, esseulé, face à une maladie qui, en nous, s'installe et ne cesse de nous ronger? Pouvez-vous imaginez la terreur vous happer alors que, dans la detresse, la douleur extreme et l'agonie, vous vivez en pleine conscience vos derniers instants, chez vous ou sur un froid brancard (ou une toute aussi froide maison de retraite), dans la plus insondable indifférence? Voilà ce que leur systeme fou et leur chienlit a enfanté.

Photo: Denis SALEM, https://denissalem.ovh

Alors que s'effrite les derniers pilliers de notre société, ma conviction reste qu'un maillage collectif doit se dresser. La nature de ses liens serait l'écoute, la bienveillance, l'empathie, la solidarité, l'humanité et la protection du vivant. Une toile qui, structurellement, prendrait soin de chacun de ses individus. Où chaque noeud serait un.e référent.e ou une référence (un lieu). Et, où ses noeuds doivent pulluler, et la toile s'étendre et se densifier. Non pas en se coupant de notre société, mais bien, à bas bruit, en son centre, s'enraciner.

Pour ça, armez-vous d'un savoir qui nourrira votre pouvoir personnel, en vous formant aux premiers secours, à l'herboristerie, au jardinage, à la mycologie, à la couture, apprenez l'électronique de base, la méditation, à nager ou tout autre domaine qui vous parlera et que vous jugerez essentiel.

Alimentez le local, nourrissez votre écosystème rural, tissé un lien fort avec les artisans qui peuplent votre centre-ville, achetez votre pain chez le boulanger, vos fruits à l'AMAP ou chez le maraîcher, vos livres chez le libraire, etc. Nos îlots de résistance et de résilience.

Occupez vos FabLabs. Qu'ils demeurent vos QG dans la lutte contre l'obsolescence programmée. Qu'ils abritent la créativité, l'échange et la convivialité qui vous ressourceront.

Autant que vous le pouvez, adoptez la June afin qu'elle irrigue vos initiatives, vos interconnections, qu'elle s'érige comme pierre inoxydable de confiance au commun.

Tout les lieux où, tels les cellules d'un corps, vous vous coagulerez, transmutez-les en de rayonnantes auberges espagnoles. Faites que ces undergrounds tissés demeurent le baume sur les carences d'un système condamné, qu'ils accueillent et préservent votre collectif, votre individualité. De ces sanctuaires de convivialité, seront pensés et construits un espoir, un avenir meilleur, une destinée.

Face aux ténèbres qui nous enserrent, contre leurs chimères puantes qui dévorent notre monde, contre ses limbes, sa cruauté qui a métastasé les âmes et les coeurs, soyez les anges gardien du vivant, incarnez la générosité, la beauté, la compassion, l'amour, la Conscience.

Prenez soin de vous et de votre monde...

Il était de ceux dont le départ à la retraite laisse un vide abyssal. Stephan Pietrons n'était pas qu'un vétérinaire. Il était de ces figures tutélaires que l'on ne songeait pas à voir partir. Un pilier, un repère, un éclat d'humanité qui, pendant quarante ans, aura veillé sur les plus vulnérables, les invisibles, ceux qui n'ont ni voix, ni droits, ni recours : les animaux.

Dans un monde où la médecine vétérinaire a troqué le soin contre le protocole, la compréhension contre l'automatisation, la compassion contre le rendement, il faisait figure d'exception. Il n'était pas de ceux qui alignent les examens superflus pour remplir une facture. Il était de ceux qui écoutent, qui regardent, qui comprennent, qui soignent avec la seule arme qui vaille : l'expérience et le cœur.

Son cabinet n'était pas un cabinet. C'était un havre, un lieu où la médecine vétérinaire prenait tout son sens. Un espace aux murs saumonés, hors du temps, où chaque consultation se tissait de discussions sur la biologie, le cinéma, et la vie. Car Le Dr Pietrons ne soignait pas seulement les bêtes. Il prenait soin des âmes.

Il en fallait, de la patience, de la générosité, pour répondre toujours présent. Pour ouvrir quelques fois ses portes en dehors des horaires, pour accueillir les animaux blessés, pour se battre contre l'inéluctable, pour panser le corps et alléger la fin quand il n'y avait plus d'autre issue. Combien d'êtres vivants doivent leur survie à ce vétérinaire sans artifices, armé d'une simple radio, d'un automate rudimentaire, et d'une connaissance qu'aucun algorithme ne saurait remplacer ? Je fus témoin de toutes ces vies sauvés in extremis, quand d'autres cabinets, froids et procéduriers, les auraient laissés pour morts au nom d'une procédure aveugle ?

Nous avons trop peu de figures comme lui, et déjà, elles disparaissent sous l'ombre croissante des cliniques aseptisées, où l'on ne voit plus un animal malade, mais un client solvable. Où l'on soigne moins qu'on ne facture. Où l'on prescrit plus qu'on ne comprend.

Aujourd'hui, son absence laisse un vide. Immense. Brutal. Non seulement pour ceux qu'il a accompagnés, mais pour ce que son départ symbolise. Il était de ces êtres qui rappellent que la médecine n'est pas qu'une science, mais un art, un engagement, une relation. Une humanité.

Il habitera toujours la mémoire de ceux qui ont croisé sa route. Dans le regard d'un chat sauvé. Dans le silence de ceux qu'il a accompagnés vers la fin. Dans les souvenirs d'une époque où l'on soignait encore par nécessité et non par opportunisme.

À jamais, vétérinaire. À jamais, humain.

Rédigé dans l'obscurité du 20 mars 2024:

Jusqu'à son dernier souffle, cette délicate boule de neige se dressa en archétype de bravoure et de douceur.

Contre cette brutale et cruelle bactérie mangeuse de chair, jour après jour, je l'ai vu lutter, et en un combat qui fatalement la condamné, nous fûmes les témoins accablés de toutes les forces qu'elle, héroïquement et silencieusement, déployait.

A aucun moment, alors que ma mère et moi faisions couler des pluies d'antibiotiques sur ses tissus laissés à vifs pour espérer, vainement, freiner la progression folle de ces insondables creusés microbiens, et alors que les transports chez le vétérinaires se succédaient d'une façon exponentielle, que les injections et autres tortures se cumulées, jamais elle n'exprima de rancœur à notre égard, jamais elle n'eut de réactions violentes, pas un seul coup de griffe, elle ne montra qu'une faible résistance, une douleur murmurée comme unique rébellion. Témoignant de la résignation entière à cette tragédie, à son triste sort, et de la confiance inconditionnel qu'elle n'eut de cesse, malgré tout, de nous porter.

Ces immondes bacilles ne rongeaient pas seulement son esprit et sa chair, ils dévoraient affreusement son énergie, sa vie. Dieu en est témoin, j'ai tout essayé pour arrêter ce sinistre compte à rebours, en modifiant son alimentation pour la remplir de noix de Saint-Jacques et de rillettes de thon. En vain. Jour après jour, son corps se vidait, devenant une ombre de ce qu'elle avait été, un squelette fragile, passant ses derniers jours cloué dans un doux et ouateux plaide qui lui fut dédié.

Lorsque le froid s'empara de son corps pour la dernière fois, enveloppée dans une épaisse couverture molletonnée, sa patte gauche dépassant, je plaçais deux de mes doigts contre ses coussinets pour la réchauffer..Au moment de les retirer, ce petit corps inerte sortie ces griffes, pour m'agripper et me retenir. Alors je restais. Plusieurs fois nous répétions cette déchirante danse, jusqu'au moment où elle décida de me laisser partir. Ce fut notre dernier échange, gravé à jamais dans mon âme.

Face à cette confession, les rires moqueurs et l'arrogance des cœurs atrophiés pourraient tenter d'envahir cet espace. Je les laisse se noyer dans leur orgueil, leurs préjugés nauséabonds, leur médiocrité et leurs ténèbres. Ils ne pourront écraser ces lignes. Cette ode est une nécessité impérieuse, destinée à tous ceux qui comprendront la profonde gratitude que j'éprouve d'avoir connu cette adorable petite créature et d'avoir partagé nos vies pendant près de 19 ans.

Sachez-le, j'ai toujours vu plus d'humanité dans chaque animal que dans la majorité de ceux qui peuplent mon espèce. Son combat n'était pas seulement contre la maladie, mais aussi contre une société qui, trop souvent, refuse de reconnaître la profondeur des liens qui unissent tous les êtres vivants.

Très chère Aspirine, ma tristesse et mes larmes sont l'encre de cette maigre oraison funèbre, qui loin d'être un simple adieu, demeure un cri déchirant vers les cieux, un refus de laisser l'oubli consumer la mémoire d'une âme si précieuse. En attendant, la Valériane et l'Opium apaiseront les blessures du vide que tu laisses. Les liens du cœur ne se brisent jamais. Dans la roue des incarnations, nous nous retrouverons.

Repose en paix, ma chère Aspirine, dans la sérénité d'une existence éternelle.

Tendres et éternelles pensées...

Sidoine B.

La douleur ne s'estompe jamais. Elle reste ancrée dans notre cœur et dans notre âme, chaque jour qui passe, chaque instant qui s'écoule. Aujourd'hui, nous commémorons les 108 ans du génocide arménien, un massacre perpétré contre notre peuple, notre culture, notre identité.

Je ne peux m'empêcher de penser à toutes ces vies brisées, à tous ces rêves anéantis, à tous ces êtres chers perdus. Comment peut-on oublier la terreur qui a régné dans les villes et villages arméniens, les déportations forcées vers des camps de la mort, les massacres brutaux, les viols, les tortures ? Comment peut-on ignorer la négation systématique de ces atrocités par les autorités turques, la complicité de nombreux pays qui ont préféré fermer les yeux, le silence assourdissant de la communauté internationale ?

Nous commémorons aujourd'hui cette tragédie pour ne jamais oublier, pour honorer la mémoire de nos ancêtres et pour rappeler au monde que justice n'a pas été rendue. Nous n'oublions pas que ce génocide a inspiré d'autres horreurs, d'autres violences perpétrées à travers le monde. Nous n'oublions pas que la haine, la xénophobie et le racisme ont encore cours aujourd'hui, menaçant à nouveau notre humanité commune. Alors, aujourd'hui, je rends hommage à tous ceux qui ont souffert, à tous ceux qui ont lutté pour notre survie, à tous ceux qui ont perdu la vie dans ce génocide.

Je prie pour que leurs âmes reposent en paix et pour que la justice soit enfin rendue.

Nous n'oublierons jamais.

Ce billet est la copie de mon post FaceBook publié le 23 février 2023

En cette vaste bouffée délirante à ciel ouvert, où coexiste apparat et réalité, autolyse et survie, hubris et abnégation, nos sociétés semblent manifester les prémices de leurs obsolescences. Les temps sont cycliques, et les civilisations rompues laissent place à de nouvelles. Toutes les richesses que nous avons acquises, de connaissances, de créativités ou d'échanges, qui permirent d'assurer notre survie et un certain confort matériel, semblent révéler nos carences inavouées et leur terrible fuite en avant.

En fond, un courant enfle, une future révolution qui peu à peu, en réponse, à nous se propose: celle de la Conscience. Une évolution impliquant une refonte radicale de l'existant, faisant éclore une population considérant ses erreurs passées, ses mauvaises décisions, et repensant ses fondements par une réelle sagesse où la protection sine qua non du vivant serait omniprésente, où tous les règnes, Minéral, Végétal et Animal, seraient préservés de notre déraison, et de notre cruauté. Un collectif conscient de son hyposensibilité, de son hypoxie, de ses valeurs intrinsèquement humaines à retrouver, de sa structure sociétaire, de sa consommation et ses moyens de production à réviser en profondeur.

Partout, des initiatives en ce sens se déploient. Parmi elles, entre autres, celle de Loic Le Meur. Un entrepreneur français, pionnier du Web au début des années 2000, qui fut happé durant près de 5 ans en plein coeur de la forêt Amazonienne, à une singulière initiation à la médicina, cumulant intensément Dietas, Vision-Quests, cérémonies et autres savoirs ancestraux qui le transformèrent à jamais, par une conscience élargie et, in extenso, une haute sérénité. De retour, il fonda PAUA.life afin de relier, et non plus opposer, deux concepts majeurs “Ancient & future Technologies”:

“Nous avons l'opportunité de réintégrer les connaissances anciennes dans notre civilisation moderne pour créer un nouveau récit pour l'humanité qui offre une vision positive de l'avenir de notre civilisation. Paua est la création de connexions entre le monde matériel et les royaumes spirituels, tout en offrant une exploration dans un large gamme de connaissances anciennes. Paua explorera l'avenir du Web3, du metaverse et de l'IA ainsi que comment la conscience peut être la base fondamentale pour conduire des affaires, des applications et la transformation de soi. Nous offrons un espace aux personnes visant les mêmes esprits pour se réunir, pour rêver de notre avenir, pour activer leur but de vie et se rappeler de la responsabilité que nous avons en tant que gardiens de cette planète.”

Les drones, originaires du domaine militaire tombés dans le civil, ont commencé à prendre pied en certains secteurs. Dans l'audiovisuel, pour tous les plans aériens qui nécessitaient la mobilisation d'hélicoptères ou autres moyens importants, aujourd'hui ces drones s'y sont substitués comme solution moins coûteuse, infiniment plus pratique et, surtout, beaucoup plus écologique. Idem dans le secteur de l'expertise de bâtiments, où un entrepreneur comme Vincent s'est saisit de cette innovation pour fournir de précis diagnostiques immobiliers et topologiques, grâce à de petits et puissants aéronefs tenant dans quelques valises.

Outre quoi, ces avancées technologiques sont considérables, tout en réduisant nos impacts sur l'écosystème, leurs applications n'en sont qu'à leur début. En fevrier dernier sortait une publication de l'ERC évoquant les bénéfices majeurs des drones dans les soins d'urgences, par l'apport de matériel médical: DEA, anticonvulsivants, antihistaminiques, etc.

Vous le savez, durant près de 18ans j'ai été engagé en une activité de prompt secours, en qualité de secouriste puis de formateur. Mes ami.e.s, certains d'entre vous m'ont transmis ce savoir précieux, technique, théorique, pratique ou pédagogique. Pansant au mieux, à vos cotés, les giclées de sang, les os brisés, les malaises saturés et la détresse traversée, ainsi qu'en formant le grand public ou les futures flottes d'équipier.e.s, tandis que, parallèlement, ma formation professionnelle m'emmena à accéder aux plus grands services et laboratoires de la région (Hematologie-Hemostase, Neurovasc, Réa, etc.). Alors, comme vous, je sais les drames qu'un délai trop long dans une prise en charge peut engendrer, et comment les drones pourraient y pallier.

Ils pourraient même remodeler notre système médical actuel, permettant un maillage en des zones désertées ou inaccessibles, livrant un traitement ou matériel nécessaire sur place, mais également, on peut l'imaginer, transporter des échantillons biologiques pour analyse, ou bien déposer des Cogniscans, des EEG/ECG miniaturisés où il y aurait besoin.

Ce changement est à notre portée. Malgré ça, depuis 2014 nos sociétés l'ont ignoré, préférant orienter cet outils pour le contrôle de la population (cf. Chine), l'escalade militaire, la livraison de fastfood ou la livraison de commandes Amazon dont nous connaissons l'impact écologique délétère.

Toutefois, je suis convaincu que cette opportunité sera saisie. De part son accessibilité. J'ai vu plusieurs châssis de drones imprimés au Fablab Robert-Houdin, et avec quelle facilité un tel projet pouvait prendre forme. Et d'autre part, les appuis du secteur privé (similaire à PAUA) qui, par ses prises de conscience émergentes, désinvestiront le superflu et la nocivité pour alimenter d'autres directions plus alignées à un monde toujours plus conscient, lucide de ses conséquences, de ses choix et ses défis.

Avant-hier, au détour d'une discussion avec Eric et Emeline, émergea un souvenir de lycée, que je souhaitais ici également vous confier: mon accès, par voisin de classe interposé, à un collectif secret et occulte. Alors que l'angoisse du bug de l'an 2000 avait gagné tous les esprits, un autre épiphénomène dissimulé se déployait à notre hexagone: la FLNJ (Front de Libération des Nains de Jardin).

Depuis quelques jours, mon habituel voisin de table semblait éreinté. Après de longues négociations, lui assurant mon silence, il finit par m'exposer son appartenance à la FNLJ, me délivrant ainsi tous ses rouages profonds: le repérage, la saisie des nains, nécessitant en amont l'étayage complexe d'une stratégie, d'un plan B, voir C, puis de leur libération en forêt.

Un matin, avachi sur son dessin tech, il me confia, emplie de joie: "hier soir, on en a libéré cinq". D'autres mâtinés, arrivé en des états déplorables, où il profita des premiers cours de la journée pour, par somnolence, récupérer d'expéditions nocturnes beaucoup plus sportives, par leurs interminables poursuites de colossales Bergers-Allemands.

Ce mouvement qui, nationalement, naquit en 1996 à Alençon contamina les quatre coins de notre pays, jusqu'à ce que, avec les années, mon voisin et quelques-uns de ses amis se décident d'embrasser cette cause et en constituer leur petite cellule à l'échelle communale. Avec le temps, le phénomène prit une importance, par le nombres de libérations croissantes, tel qu'il poussa les policiers municipaux à œuvrer contre cette lutte, et nécessita pour les libérateurs plus de vigilance.

En plein cœur de cette guerre froide, certains torchons torpillèrent ce mouvement et son folklore, en incriminant et réduisant ses agissements au simple délit de vol, tentant de gangrener les esprits, faisant passer ces joyeux lurons pacifistes pour de dangereux terroristes.

Pourtant, imputer quelconques traits de délinquance à mon voisin de classe et sa petite poignée de camarades, serait au mieux de l'incompréhension, au pire une pure forfaiture.

Chaque nuit, tous les écueils bravés, afin de rendre la liberté au maximum de nains en pleine forêt, alors que les lampes frontales n'existaient pas encore, armés, uniquement, d'ingrolables torches électriques Mazda, et de mobylettes Peugeot 103SP trafiquées avec pots Ninja. A chaque exfiltration de nains, était laissé un mot disant, en substance: "Nous avons libéré vos nains, ils sont actuellement en forêt[lieu exact]. Signé FLNJ". Le constat fait, qu'il n'y avait nulle volonté de nuire, mais uniquement s'adonner, humainement, à un jeu. Les mots "Sans armes, ni violence, ni haine", auraient pu y figurer (chacun aura la ref)

Réduire cette action au vol, c'est masquer volontairement toute la portée hautement symbolique qui se jouait: la libération d'êtres en captivité. Jeu, complicité humaine et humour que notre société a su annihiler. En 2006, la fin des activités de la FLNJ, laissant derrière elle quelques émissions radio, articles et témoignages comme le mien. Témoignage permit par ce voisin de classe qui me livra, nûment, toute la mécanique interne de ses quelques semaines en cette mouvance.

Merci à lui,

Liberez-Les Tous...

Texte publié le 16 juin 2020 sur mes réseaux sociaux

Aujourd'hui, triste anniversaire, Tupac SHAKUR aurait eu 49 ans.

D'une vie arrachée, à l'age de 25ans, par quatorze balles de son corps criblé, obligeant, depuis, l'humanité orpheline à errer en ses limbes.

Indéniable plus grand rappeur de tous les temps (tous ses successeurs ne seront que de pales copies), traversé par la survie d'un milieu qu'il transmuta par la mise en lumière de ses causes sociétaires profondes et ses violences .

Outre sa prodigieuse carrière sur la scène hip-hop, tel la minuscule partie visible de l'IceBerg, son oeuvre, occultée, infiniment plus vaste et subtile, témoigna de sa réelle nature d'artiste, par l'abondante écriture de textes, de pièces de théâtre, etc.

Auteur de Thug Life - acronyme de The Hate U Give Little Infants Fucks Everyone -, enfant de Black Panthers, meurtri par l'injustice structurelle, ébranlant le système en ses racines qui, selon les hypothèses de certains, par son potentiel politique, précipita à son exécution inévitable.

Luttant, de ses précaires forces, alité, souffrant ses derniers instants, d'une existence éphémère, dont son incarnation foudroyante laissa l'emprunte à notre peuple de son unique volonté, de voir se hisser une société meilleure, plus en paix, et intrinsèquement humaine.

Devant un corps médical démuni par la fatalité, son coeur cessant de battre, puis émettant son ultime expiration, Tupac, nous insuffla la plus belle arme, l'espoir.

ICantBreath